Nona, source d’inspiration pour un approvisionnement bio local dans la restauration
Contrairement à ce que nous pensions en nous rendant dans le 5ème établissement de Nona, rue du Bailli à Bruxelles, son nom ne signifie pas « grand-mère » (nous n’avions pas revu notre italien avant l’interview) mais « No Name ». Un choix qui traduit le souhait de son fondateur, Sebastian, qui ne veut pas être vu comme le seul à porter le projet mais, au contraire, souhaite mettre en avant les multiples acteur·rices qui assurent la réussite des restaurants. Il nous explique que « c’est grâce à une collaboration étroite avec les fournisseurs, les cuisinier·ères, les employé·es que tout cela est possible ». Il n’y a donc pas qu’un nom derrière l’enseigne, mais bien celui d’une multitude de personnes. D’ailleurs, Sebastian veut connaître chaque producteur·rice derrière chaque produit qui est servi dans les restaurants Nona.
« Une cuisine italienne. Des ingrédients bio locaux. C’est ça Nona. »
Nona, ce sont aujourd’hui 5 restaurants à Bruxelles, les uns spécialisés dans la pizza, et les autres dans les pâtes. Des mono-concepts avec toujours la même volonté : proposer un maximum de produits bio locaux, connaître tou·tes les producteur·rices, tenir compte de la saisonnalité, assurer le bien-être des employé·es, le tout en proposant une cuisine de qualité.
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Originaire de Courtrai, Sébastian, a étudié l’économie à Leuven et a travaillé 15 ans dans la finance à Londres. Il a toujours eu l’envie de créer son entreprise. Il a d’abord investi auprès de jeunes entrepreneurs et a été à l’écoute de nombreux modèles économiques. Dans le même temps, le secteur de la restauration a commencé à évoluer, de nouveaux concepts sont nés, gérés de manière plus « commerciale » que « familiale » avec l’apparition des mono-concepts dupliqués en plusieurs enseignes.
Son bagage commercial, combiné à ses racines italiennes et son enfance vécue à la campagne où l’on mange de manière simple et selon la saison, mais aussi l’émergence de nouveaux modèles dans le secteur Horeca, toutes ces choses réunies l’ont conduit à imaginer Nona. Mais pas n’importe comment : en pensant le concept de A à Z, en intégrant ses valeurs et en analysant précisément comment le rendre rentable. Comment offrir des plats à base de produits de qualité, bio, autant que possible locaux, en suivant les saisons, accessibles financièrement, dans une capitale, tout en maintenant un budget équilibré ? La réponse est dans les chiffres. Un modèle économique ultra ficelé qui tient compte du moindre détail et un contact direct avec chaque producteur·rice pour assurer un prix juste des deux côtés et une qualité irréprochable. Le tout, duplicable pour faire du volume et se concentrer sur un type d’offre. Voilà son secret.
« Bonne nourriture. Bonnes personnes. Bon pour la planète. »
Pour Sebastian, avoir un restaurant équivaut à détenir le « pouvoir d’achat » de ses client·es et il veut absolument l’utiliser à bon escient en travaillant avec des productrices et des producteurs bio et principalement locaux. C’est de cette manière qu’a commencé sa collaboration avec Patrick de Buffl’Ardennes pour s’approvisionner en mozzarella, ou encore Dries de Mille Couleurs qui fournit des légumes.
Pour les produits plus spécifiques, ceux-ci proviennent d’Italie, comme les tomates en conserves produites par une coopérative dans les Pouilles, le parmesan, ou encore des farines de blé dur qui ont besoin d’ensoleillement. Toujours en bio et auprès de producteur·rices avec qui Nona est en contact direct. Chez Nona, on respecte les saisons, on ne sert pas de tomates fraîches ou de basilic s’il n’y en a pas chez Dries. Les recettes sont adaptées à ce que le producteur a la capacité de fournir, selon la météo.
Pour Sebastian, les restaurateur·rices peuvent aussi créer l’offre en formulant leurs besoins auprès des producteur·rices. Concrètement, il cherchait de la fior di latte, de la fleur de lait à base de lait de vache, une mozzarella au processus de production similaire à celui de la mozzarella à base de lait de bufflones. Patrick, son fournisseur de mozzarella, n’élève que des bufflones, il ne pouvait donc pas lui offrir ce produit. Pourtant, forts de leur collaboration et de la confiance créée au fil des années, Patrick a appris la technique de fabrication de la fior di latte et s’approvisionne en lait de vache bio local chez un collègue. Aujourd’hui, il livre les deux fromages à tous les restaurants Nona. Un bel exemple de collaboration réussie.
La certification, gage de qualité
Les restaurants ne sont certifiés bio que depuis 2 ans et à 75% de la valeur d’achats annuels. S’ils ont passé le cap, c’est parce que la clientèle se disait qu’il était impossible de manger bio tout en ayant des prix abordables. Il fallait donc pouvoir communiquer officiellement sur le caractère bio des produits.
Aujourd’hui, les restaurants Nona comptent 30 personnes en cuisine. Une partie est centralisée dans un atelier pour la production des pâtes à pizza et des pâtes fraîches faites à base de farines bio, tandis que certains produits, comme des sauces, certifiées bio, ont été externalisées tout en conservant les recettes et ingrédients de Nona.
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La plupart des produits sont maintenant livrés via une plateforme logistique pour pouvoir approvisionner tous les restaurants, tout en garantissant des prix rémunérateurs aux producteur·rices. L’objectif est de conserver la relation qui a été créée depuis le début de l’aventure et de garder des prix justes pour les différentes parties.
D’après Sebastian, le coût le plus important, c’est celui du personnel, et non celui des produits, surtout si on fait du volume. Ce n’est donc pas un souci de payer un peu plus pour avoir des produits de qualité. Et pour que les employé·es soient sensibilisé·es et puissent parler facilement de la démarche des restaurants, des visites des producteurs sont organisées trois fois par an. Pour Sebastian, rien de tel que le producteur lui-même qui explique : sa démarche, les heures de travail derrière chaque produit, ce qu’il y a derrière l’appellation bio et la relation entretenue avec Nona. Une manière aussi d’assurer aux employés que la démarche est bien réelle et qu’on est loin du greenwashing.
Quand on lui demande « pourquoi le bio ? », il nous assure qu’il n’y a rien de tel pour une qualité de produit avec un goût incomparable que de manger de saison et bio. Pour lui, les producteur·rices certifié·es sont vraiment en adéquation avec la nature. La philosophie chez Nona, c’est d’acheter les meilleurs produits, au meilleur moment, et d’adapter la carte en fonction. Chez Nona pizza, on retrouve toujours un choix de 8 pizzas et chez Nona pasta, un choix de 8 plats de pâtes qui changent tous les mois.
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En cuisine, les chef·fes savent d’où viennent les produits qu’ils travaillent. Et à table, l’objectif est de recréer ce lien entre le producteur et le client à travers le produit qu’il consomme. Si les client·es se demandent pourquoi il n’y a pas de tomates fraîches ou du basilic une bonne partie de l’année à la carte, c’est l’occasion de le sensibiliser à la démarche !
D’ailleurs, si vous avez l’occasion de passer chez Nona, en plus de consommer des aliments de qualité, vous profiterez des cartes postales qui égaient les tables, telles une ode aux producteurs et produits que vous retrouverez dans vos assiettes.
Nona Pizza – Ste Catherine, Mérode, Flagey
Nona Pasta – Ste Catherine, Bailli
www.nonalife.com
Auteure : Hélène Castel, Biowallonie